NOAH : LE CORBEAU ET LA COLOMBE

Par Rav Chaoul David Botschko

            Après que les eaux du Déluge eurent commencé à se retirer, l’Arche de Noé se posa sur le Mont Ararath. La Torah nous raconte ensuite une longue histoire, celle du corbeau et de la colombe[1] : "C’était au bout de quarante jours, Noé ouvrit la fenêtre qu’il avait pratiquée dans l’Arche : il envoya le corbeau ; celui-ci sortait, revenait, tant que les eaux ne s’étaient pas complètement retirées. Il envoya la colombe pour voir si les eaux avaient diminué de la surface de la terre. Et la colombe ne trouva pas d’appui où  poser la plante de ses pattes, et elle revint dans l’Arche, car il y avait de l’eau sur la surface de toute la terre; (Noé) la prit, il la ramena dans l’Arche. Il attendit encore sept jours, et il renvoya la colombe de l’Arche. Elle revint vers le soir, et voici qu’elle tenait une feuille d’olivier dans son bec, et Noé sut que les eaux avaient diminué sur la terre. Il attendit encore sept jours, il envoya encore la colombe, qui ne revint plus... C’est alors que Noé ouvrit le plafond de l’Arche ;  et il constata que la surface de la terre était desséchée... D-ieu parla à Noé et lui dit : "Sors de l’Arche... multipliez-vous sur la terre. ""

            On ne comprend pas ce que signifie ce long passage, qui nous parle avec force détails du corbeau et de la colombe que Noé a envoyée.  Pourquoi les a-t-il envoyés? Que nous apprennent-ils ?

            Mon père, Rav Moshé Botschko, a expliqué que nous devions tirer de Noé deux enseignements. Le premier, c’est que l’homme doit s’efforcer lui-même de comprendre ce que D-ieu attend de lui, et à quelle sorte d’époque il vit. Vit-il l’époque du déluge et des destructions ? Ou bien la période de délivrance, de Gueoula, est-elle déjà arrivée ?

            Le deuxième enseignement, connexe au premier, est que, pour guider ses pas, D-ieu s’adresse à l’homme non seulement par une prophétie, mais également par des événements que celui-ci doit s’efforcer de déchiffrer.

            Noé envoie d’abord le corbeau qui est un animal impur. Celui-ci tournera en rond jusqu’à ce que la terre soit parfaitement sèche. Il n’est pas capable de comprendre les signes avant-coureurs de la décrue des eaux. C’est pourquoi Noé choisit ensuite la colombe, animal pur, afin qu’elle puisse signifier à Noé le moment où les eaux diminueront de la surface de la terre.

            Après que Noé a fait le premier pas pour préparer sa sortie de l’Arche, D-ieu s’adresse à lui en ces termes: "Noé, sors de l’Arche." Puis Il ordonne à Noé et à ses enfants : « Multipliez-vous. » En d’autres termes, D-ieu donne à Noé l’enseignement suivant: « Le fait qu’une nouvelle époque soit arrivée et que tu aies été capable de l’identifier par toi-même n’est pas suffisant. Il te faut comprendre que tu dois changer ta manière d’agir, dès maintenant; que toi et tes enfants devez recréer l’humanité, et qu’ainsi vous êtes responsables de son avenir. »   Et c’est ainsi qu’il faut entendre  : « Sors de ton Arche » : sors de ta tour d’ivoire ; « et multipliez, fructifiez sur la terre » : recréez une humanité digne de ce  nom.

            Tout au long de l’Histoire, il est du devoir du Juif, à l’exemple de la colombe, de tenter d’identifier les signes annonciateurs de la Gueoula, du Retour. Puis il faut comprendre  les implications du message de D-ieu. Comme nous dit le prophète Amos : "Lorsque D-ieu parle, qui ne prophétisera pas ?". Lorsque D-ieu parle au travers de l’Histoire, par ses interventions miraculeuses, chacun doit comprendre qu’il faut agir conformément aux temps nouveaux.

 

 

(mise en forme : J.D. Hamou)



[1] Béréchit, Chapitre 8, Versets 6 et suivants


Sur cette paracha, voir aussi le texte adapté de Rav Y. Katsover : Noah' : Le tourment de la Techouva